La parution du dernier livre de Jean Parvulesco, La confirmation boréale, est un évènement majeur, totalement occulté par les « médias autorisés ». Pour tous ceux qui veulent comprendre le monde – celui dans lequel nous sommes et celui vers lequel nous nous dirigeons – cet ouvrage sera incontournable.
C’est avec l’aimable autorisation des Editions Alexipharmaque que nous vous présentons, en exclusivité, un chapitre entier de La confirmation boréale.
Mecanopolis
Que l’on en soit réellement conscients ou pas, nous nous trouvons à présent sur la ligne du partage des eaux de la « grande histoire », soudain proche de son terme : quelque chose y prend fin définitivement, et quelque chose d’autre va bientôt s’y passer, abyssalement, quelque chose d’absolument nouveau.
La terreur sournoise et dégradante exercée, à l’échelle planétaire, par la subversion suractivée de la conspiration mondialiste qu’arme, justifie et n’en finit plus d’imposer sa doctrine du « politiquement correct » soi-disant démocratique, atteint, à l’heure présente, les ultimes limites dé l’insupportable, du cauchemar permanent et total. Arrivant, ainsi, en ces extrémités, à ce paroxysme final de l’affirmation active, des impositions subversives et totalitaires de la conspiration mondialiste en place et de sa terreur démocratique incapacitante, l’histoire mondiale semble s’être momentanément arrêtée dans sa marche, comme auto-immobilisée dans l’attente de l’instant fatal où il lui faudra basculer, inéluctablement, dans un état absolument contraire à celui de son actuel blocage négatif total, changer entièrement de sens.
Car une nouvelle forme spécifique de changement est à présent apparue dans le devenir visible de l’histoire mondiale, une nouvelle forme ontologique d’action directe dans le cours immédiat de l’histoire, qui implique et décide, à terme, quand l’heure en vient, l’auto-destitution aussi totale qu’instantanée, sans la moindre intervention extérieure, de toute situation de pouvoir fondamentalement constituée, s’affirmant politiquement et fût-elle apparemment inexpugnable en ses assises du moment : ce qui semblait ainsi devoir durer indéfiniment, disparaîtra alors d’une mystérieuse manière soudaine, sans laisser de trace, effacé à jamais du courant de l’histoire ; comme si rien il n’y avait eu.
Comprendre ce qui fait avancer l’histoire par en-dessous…
C’est que, lors de ses grands changements, lors de ses grands tournants décisifs, imprévisibles, soudains, l’histoire se trouve forcée de muer, de se transformer de par le mystère même de ses propres profondeurs irrationnelles, mystère en action que seules mènent, depuis l’invisible, les décisions révolutionnaires occultes de la Divine Providence toujours là, toujours dissimulée derrière les événements immédiatement visibles. Comprendre l’histoire dans sa marche, ce n’est pas en pénétrer les raisons objectives, qui ne sont jamais que des apparences arrangées, mais ne pas méconnaître l’identité abyssale de ce qui la mène et fait avancer vraiment, par en-dessous, suivant un dessein providentiellement conçu et conduit d’en dehors des temps.
Ainsi en avait-il été de la fin abrupte du communisme soviétique et de l’ensemble de ses conspirations subversives de dimensions planétaires : sans la moindre intervention visible venant de l’extérieur de ce qui était en train de se passer au moment décisif, sans absolument aucune raison objective, à l’heure prévue – et que personne n’attendait, parce qu’il s’agissait d’une heure occulte, supra-historique – il s’en était produit comme un brusque effondrement total, de l’intérieur de celui-ci, comme un soudain éclair noir, annulant tout, et la plus grande puissance politico-militaire du monde a cessé d’exister, s’est trouvée comme aspirée par le néant qu’elle portait secrètement en elle, instantanément. Et tout à fait définitivement, sans trêve ni recours.
L’histoire démocratique de l’Europe est morte
Or cette même nouvelle structure ontologique d’auto-destitution instantanée, mystérieuse dans ses apparences, vient également de frapper l’ensemble de l’actuelle situation politique européenne. Disparues, dans le néant de leur propre auto-destitution, les toutes-puissantes démocraties chrétiennes italienne et allemande, tout comme semble s’être évanoui le grand rêve impérial européen du « gaullisme de la fin » et, en France aussi, le vaste mouvement de mobilisation populaire qu’avait mis en place le Front National, ainsi que le Parti Communiste lui-même, éclaté, de l’intérieur, en des morceaux disparates. Alors que, sous les apparences mêmes de leur pouvoir, à l’heure présente inconditionnellement encore en place – en France, en Allemagne, en Italie – la social-démocratie, sous-traitance locale de la conspiration mondialiste, installée partout en Europe, ainsi qu’en Grande Bretagne, se trouve malgré tout, elle-même, désormais, à la merci du brusque mouvement sismique des profondeurs qui va la renvoyer, d’un moment à l’autre, à son trou noir d’origine. Ainsi, de Bucarest à Lisbonne, un immense désert vide, calciné, morne, immobile, « suintant des maléfices secrets, imprévisibles », s’étend au comble de la désolation, au comble de l’impuissance. L’histoire démocratique de l’Europe est morte, qui est en train de devenir sa propre fosse commune.
Or c’est bien au-dessus de cette fosse commune déliquescente que va devoir se lever, bientôt, et de quelle manière inattendue, l’immense tourbillon de feu de l’entreprise révolutionnaire grand-européenne de salut et de libération visant à mettre en piste, politiquement et historiquement, ce qu’il est déjà convenu d’appeler l’Empire Eurasiatique de la Fin.
Car, si, désormais, en ces temps d’interrègne, sans heure ni espérance ni plus aucune attente légitime, quand l’évidence de l’abdication politique de l’Europe fait fonction d’un champ d’épandage final, seule risque encore d’avoir cours, précisément, l’ontologie de l’auto-destitution instantanée de cet ensemble politique en situation terminale – ainsi que cela s’était déjà vu avec l’auto-destitution politique de l’Union Soviétique, ou avec le mystérieux évanouissement sur place des démocratie chrétiennes européennes – il n’est pas moins certain que le mouvement dialectiquement contraire, celui d’une ontologie de renversement total et de reconstitution abyssale, d’une soudaine remontée paroxystique de l’Être originel, d’une émergence de renversement absolu et de recommencement absolu d’une situation apparemment fermée sans recours puisse également avoir, lieu, à tout instant. Et tout faire basculer, d’un seul coup.
Un prochain basculement
Aujourd’hui, partout, dans l’espace intérieur propre de la plus Grande Europe, de l’Europe en tant qu’avant-garde révolutionnaire du Grand Continent Eurasiatique, le feu du retour à l’être, du redressement politique révolutionnaire de l’ensemble du continent couve souterrainement, se maintient envers et contre tout, clandestinement disponible dans l’attente de cette « émergence de renversement absolu et de recommencement absolu » qui doit marquer le prochain basculement de l’actuelle situation politique européenne en son propre contraire. Cela, c’est bien la dialectique agissante de la nouvelle forme d’intervention ontologique dans l’histoire qui l’exige, à travers son double commandement de l’auto-destitution du passé, des formes condamnées et déjà révolues, et de la mobilisation abyssale de ce qui, soudain, sera appelé à donner son nouveau visage à l’avenir déjà, secrètement, en marche.
Du projet océanique fondamental de l’Amiral Gorchkov
En conclusion à un travail de recherche politico-révolutionnaire que je faisais paraître, en 1976, sous le titre de La ligne géopolitique de l’URSS et le « projet océanique fondamental » de l’Amiral G. S. Gorchkov, j’avais placé, prophétiquement – à présent je m’en rends compte – les lignes suivantes, dont l’actualité me paraît tout à fait saisissante, plus que jamais immédiatement opératoire :
« C’est sous le jour de cette conception intériorisante de l’histoire qu’il faudra savoir – savoir d’avance, tout est là – qui, en Union Soviétique, finira par l’emporter, à l’heure voulue, sur l’autre camp, implacablement, pour s’engager aussitôt à changer – dans un sens ou dans l’autre – la direction et jusqu’à la face même de l’histoire du monde. Aujourd’hui comme hier, tel est le but unique : changer la face du monde. Cependant, dans la perspective du but unique, lequel des deux camps l’emportera sur l’autre? Celui qui saura laisser apparaître, en son sein, la volonté de destin de l’homme providentiel, qui sera, aussi, l’homme de la dernière bataille. Quand viendra-t-il, celui-là ? Inéluctablement, à l’heure prévue. »
Or c’est très précisément l’apparition – l’avènement – de ce que j’appelais, alors, l’« homme providentiel » que, aujourd’hui que les temps sont prêts, va devoir provoquer le basculement final de l’actualité politique européenne immédiate dans le sens de son retour révolutionnaire à l’Être, fournir – au-delà de l’actuel désastre de celle-ci – sa forme ontologique décisive à un autre recommencement total de l’histoire et de la conscience politique européennes, de leurs structures d’affirmation et de présence agissante propres, renouvelées depuis leurs profondeurs originelles retrouvées.
Car c’est un fait : la déflagration révolutionnaire finale est à présent prête à éclater. Partout en Europe, des « groupes géopolitiques » de conscience et d’intervention politique clandestine impériale grand-européenne, agissant déjà sur des dimensions continentales eurasiatiques, se trouvent à l’affût de l’imminent changement de l’histoire proche de sa fin, changement qui est en train de s’amorcer souterrainement et dont ces « groupes géopolitiques » mobilisés sur place constituent la masse explosive, à laquelle l’apparition de l’« homme providentiel », du nouveau « concept absolu » de l’histoire arrivant à son point critique suprême, apportera le détonateur prédestiné.
La définition idéologico-doctrinale de ce changement annoncé, on peut la trouver, exhaustivement arrêtée, dans un récent document émanant d’une des centrales opérationnelles à l’œuvre, à demi-clandestinement, de ce vaste mouvement politique souterrain, dont celle-ci représente une des actuelles instances décisives d’affirmation révolutionnaire immédiate. De cette définition idéologico-doctrinale, en voici donc, ci-dessous, le document faisant état de son projet opérationnel de base, document connu plus ou moins confidentiellement sous le titre de « Pacte Impérial Eurasiatique ». Je cite, textuellement.
Un document fondationnel : « Le Pacte Impérial Eurasiatique »
« C’est de la confrontation de nos doctrines impériales et catholiques avec la réalité politico-historique actuelle, directe, à laquelle celles-ci s’adressent révolutionnairement, qu’il va en résulter, dialectiquement, l’émergence finale du Grand Empire catholique constituant notre objectif ultime, l’Imperium Ultimum, du Regnum Sanctum, qui devra comporter, en principe, trois stades opérationnels, trois étapes édificationnelles prévues.
Le premier de ces trois stades opérationnels, celui de l’acte même de la mise en piste du projet impérial final, concernera la création de l’axe Paris-Berlin-Moscou, pôle européen grand-continental impérial à venir. Ne devant pas comporter d’intégration politique à proprement parler de la France, de l’Allemagne et de la Russie, l’axe Paris-Berlin-Moscou n’aura qu’une première fonction de mise en convergence définitive et totale de la communion de destin – de la prédestination – des trois pays du pôle fondationnel grand-continental mobilisés en avant par une même vision impériale irrévocable, par la décision du Pacte Fondamental.
Le deuxième des trois stades opérationnels de l’IMPERIUM ULTIMUM vers la réalisation effective de l’Empire Eurasiatique de la Fin, constitué par l’intégration politico-historique totale de l’Europe de l’Ouest et de l’Est, de la Russie et de la Grande-Sibérie, de l’Inde et du Japon.
Une deuxième Guerre de Sécession
Quant au troisième stade opérationnel de l’édification révolutionnaire impériale catholique de ce monde et de son histoire finale, il devra inclure, aussi, après la réduction définitive de la conspiration démocratique mondialiste menée par la « Superpuissance Planétaire des États-Unis » et la libération révolutionnaire de celle-ci, la double instance géopolitique intégrée des deux Amériques, l’Amérique du Sud et l’Amérique du Nord. Le troisième stade impérial de l’histoire finale du monde sera celui de l’apparition de l’Archipel Planétaire unifié, entité suprahistorique, transcendantale, placée sous la lumière révélatrice, parousiale, du REGNUM SANCTUM.
Aussi la conspiration mondialiste de la Superpuissance Planétaire des États-Unis devra-t-elle prendre fin en s’auto-dé-truisant elle-même, dans les termes d’une guerre civile continentale qui sera la répétition à rebours de la Guerre de Sécession américaine, de son propre acte fondationnel des origines (1861-1865).
Lors de cette seconde Guerre de Sécession, ce sera la majorité nationale oppressée de la Superpuissance Planétaire des États-Unis, sa majorité « sudiste », traditionnelle et spiritualiste, catholique, d’héritage européen en continuité, qui va devoir l’emporter, irréversiblement, sur la partie « nordiste », anti-traditionnelle, gauchiste et matérialiste du continent nord-américain.
Et ce sera la mission prédestinée de l’Amérique du Sud qui, entre temps, sous l’impulsion révolutionnaire de l’Argentine et du Chili, aura déjà su faire, accomplir sa propre intégration continentale, que de soutenir, politiquement et stratégiquement, l’effort de la majorité nationale, « sudiste », des États-Unis dans son entreprise de nettoyage révolutionnaire final du continent nord-américain lors de la deuxième Guerre de Sécession.
Et c’est ainsi qu’à la fin de l’histoire actuelle de ce monde et au-delà de celle-ci, l’Archipel Planétaire dans sa totalité géopolitiquement intégrale va se trouver identifié, d’une manière transcendantale, supra-historique, avec le concept agissant du Grand Empire Catholique de la Fin, avec le Regnum Sanctum. C’est en cela aussi que nous reconnaissons, et affirmons tout haut, la mission, la prédestination révolutionnaire transcendantale de notre propre génération choisie pour qu’elle prenne sur elle d’accomplir le changement apocalyptique de ce monde, suivant un dessein conçu dans l’invisible. »
Le « signe du départ » : l’apparition d’un nouveau « concept absolu », d’un nouvel « homme providentiel »
Ce sont donc les « groupes géopolitiques » de l’ensemble révolutionnaire grand-européen en situation souterraine qui constituent, à l’heure présente, le dispositif d’émergence, déjà en place, du futur mouvement de basculement sismique, du futur renversement ontologique du sens de l’histoire actuelle à son terme final. Renversement qui marquera le nouveau recommencement révolutionnaire de la nouvelle histoire mondiale s’apprêtant à faire sa soudaine apparition. Laquelle, pour apparaître, n’attend plus que le « signal du départ » de son nouveau destin, l’événement fondamental qui sera celui de l’avènement-là du « concept absolu », de l’« homme providentiel », dans lequel il lui est demandé de s’incarner pour qu’elle puisse agir au niveau de l’histoire visible, encristalliser brusquement, en polariser suractivement sa nouvelle identité révolutionnaire à venir, ou plutôt qui est déjà en train de nous en venir.
Or, avec l’accession de Vladimir Poutine à la magistrature politique suprême de la « Nouvelle Russie », le « concept absolu » de la nouvelle histoire mondiale déjà souterrainement en cours, l’« homme providentiel » du recommencement abyssal de celle-ci, vient assez mystérieusement d’apparaître à la lumière du jour, et faire de par cela même que tout se jette, brusquement, en avant vers cette Totale Weltrevolution dont secrètement nous attendions tous, et depuis si longtemps, la venue définitive, l’« affirmation polaire de la fin ».
Poutine : émanation des conseils secrets des Forces Armées ?
Mais qui est, en fait, Vladimir Poutine? Vladimir Poutine, c’est avant tout et très essentiellement l’émanation directe des conseils secrets révolutionnaires permanents des Forces Armées de l’Union Soviétique, qui se cherchaient, et qui guettaient l’occasion de faire surface, de franchir la ligne du passage à l’histoire visible, active, depuis déjà les années 1948-1952, quand il y avait eu les premières manifestations de taille de leur action, de leur présence combattante, de leur volonté d’affirmation politique propre, non pas contre l’État Soviétique, mais confidentiellement au sein même des structures de pouvoir propres de celui-ci. C’est depuis lors que l’on a pu parler d’une doctrine national-révolutionnaire immanente des Forces Armées de l’Union Soviétique, doctrine qui est allée en se précisant d’une manière de plus en plus décisive à partir des années soixante, et dont les thèses géopolitiques de base se sont trouvées confidentiellement soutenues par L. I. Brejnev et, par la suite, ouvertement – ou presque – par Y. V. Andropov.
Chtemenko et Ogarkov
Deux personnalités militaires de tout premier plan passent pour avoir été, et restent encore des représentants emblématiques de pointe de la doctrine politico-militaire immanente des Forces Armées Soviétiques, doctrine globale, à demi-clandestine, ou plutôt implicite, mais, dans son temps, de plus en plus active et suractivante là où elle parvenait à agir, et qui, aujourd’hui, est en passe de devenir, effectivement, et tout à fait à découvert cette fois-ci, la doctrine géopolitique officielle de la « Nouvelle Russie ». Ces deux personnalités militaires soviétiques, sont l’ancien chef du CRU et, par la suite, de l’État-major Général des Forces Armées de l’URSS, ainsi que ultérieurement, commandant en chef des forces du Pacte de Varsovie, le Général-Colonel S. M. Chtemenko, et le Maréchal N. V. Ogarkov qui, lui aussi, tout comme le Général-Colonel S. M. Chtemenko, devait accéder, quelques années après, à la tête de l’État-major Général des Forces Armées soviétiques. C’est en tant que chef de l’État-major Général des Forces Armées de l’URSS que le maréchal N. V. Ogarkov avait tenté, et failli même réussir, une prise de contrôle totale de la direction politique de l’URSS par les Forces Armées, ayant finalement échoué à cause de la contre-conspiration rivale, qui allait amener au pouvoir, à travers le secrétariat général du Parti Communiste, Mikhaïl Gorbatchev, pour aboutir, en dernière instance, à l’auto-destitution politique irréversible de l’ancienne Union Soviétique.
Dans son livre capital, qui avait définitivement compté pour toute une génération de chercheurs, GRU, le plus secret des services soviétiques, 1918-1988 (Stock, Paris 1988), Pierre de Villemarest appelait le général-colonel S. M. Chtemenko « un des premiers géopoliticiens de l’URSS, peut-être même le premier de tous ». Aussi, sur le général-colonel S. M. Chtemenko, Pierre de Villemarest écrira-t-il que celui-ci « appartient à un clan d’officiers supérieurs, certainement « soviétiques », mais avant tout grand-russiens d’esprit, et parfaitement expansionnistes. » Et aussi : « Pour cette caste, l’URSS est un empire appelé à dominer le continent eurasiatique, non seulement de l’Oural à Brest, mais de l’Oural à la Mongolie, de la Centre-Asie à la Méditerranée. » Et ensuite : « Sur ce dernier point, Chtemenko est en effet l’homme qui a proprement inventé, de 1948 à 1952, non l’invasion éventuelle de l’Afghanistan, mais son absorption lente par interpénétration économique continue, avec subversion assortie. Et, parallèlement, l’irruption de l’URSS dans les capitales arabes, à Beyrouth, Damas, Le Caire, Alger. Fin 1948, il exposait déjà qu’à l’intersection de l’Orient et de l’Asie, l’Afghanistan offrait le moyen stratégique de couvrir les flottes que commençait à développer l’amiral Serge Gorchkov – un de ses amis personnels – pour déboucher de la Mer Noire vers la Méditerranée. » La puissance visionnaire de la géopolitique d’avant-garde du général-colonel S. M. Chtemenko nourrit, encore aujourd’hui, la démarche active des positions géopolitiques armant les bases idéologiques révolutionnaires de la « Nouvelle Russie » dont Vladimir Poutine incarne et assume les destinées, le projet impérial grand-continental eurasiatique et la mission eschatologique finale.
En allant donc à l’essentiel, on peut effectivement avancer que, par dessus l’état de fait du régime soviétique en place, et néanmoins de l’intérieur même de celui-ci, la doctrine politico-militaire immanente des Forces Armées de l’URSS comportait une double perspective opérationnelle intérieure, à la fois géopolitique et transcendantale. Sa doctrine géopolitique comprenait le projet fondamental d’une intégration politique finale, « totale », « impériale », du grand continent eurasiatique dans son ensemble, alors que sa doctrine transcendantale ne faisait que reprendre, renouveler les grands objectifs supra-historiques du tsarisme et d’une certaine conception visionnaire eschatologique, « polaire », de la prédestination spirituelle salvatrice finale, « apocalyptique », de la plus Grande Russie.
Militarisation intégrale et mobilisation générale permanente
Ainsi, quand, vers la fin des années soixante, le maréchal N. V. Ogarkov, alors chef de l’État-major Général de l’URSS, lançait l’appel – et tentait d’en imposer la doctrine – de la « militarisation intégrale » et de la « mobilisation générale et permanente » de l’appareil de production industrielle et de l’économie soviétique dans son ensemble, le tout petit nombre de ceux que l’on dit « au courant des choses qu’il ne faut surtout pas savoir » – « tout petit groupe » présent, et confidentiellement à l’œuvre en URSS aussi bien qu’en Europe de l’Est, ou en Europe de l’Ouest – n’avait pas manqué de comprendre que l’« Ordre Secret » s’apprêtait à passer à l’offensive finale, décisive, l’« Ordre Secret » de la grande conspiration immanente des Forces Armées soviétiques en place, agissant au cœur même du pouvoir soviétique, qu’elles comptaient changer de l’intérieur. D’où, alors, presque sur le coup même, le limogeage du maréchal N. V. Ogarkov, rentré provisoirement – mais ne faut-il pas plutôt dire subversivement – dans l’ombre, en attendant la suite. Car l’heure, il faudrait bien le croire, n’en était pas encore tout à fait venue de cette « offensive finale » ni, surtout, de ce que celle-ci eût impliqué et, du coup, rendu irréversible sur le plan encore non entamé des grandes stratégies politico-militaires soviétiques renouvelées par la reprise à découvert de la ligne grand-continentale eurasiatique.
Or, si tout cela n’avait pas pu se faire à ce moment-là, c’est très certainement à présent que cela va devoir se faire, à travers tout ce que signifie la prise du pouvoir, à Moscou, par Vladimir Poutine et le grand renversement révolutionnaire que celle-ci implique depuis les profondeurs.
Retrouver les principes suractivants de l’Empire russe
Cette évidence est fondamentale pour ce qui est là, réellement, en jeu : la thèse immédiatement opérationnelle de la mobilisation totale, de la « mobilisation révolutionnaire » des structures politico-administratives, sociales et culturelles, voire religieuses de la Russie en vue d’un « grand dessein » supra-historique, constituait le noyau central de la doctrine révolutionnaire immanente des Forces Armées russes d’hier et d’aujourd’hui, retrouvant ainsi les principes suractivants de l’Empire Russe des origines, suivant son identité missionnaire, « romaine, impériale », de ses premiers débuts en armes, suivant son « identité abyssale, occulte », « polaire ».
Or c’est bien de cette vision politico-historique visionnaire et de ses grandes thèses opérationnelles géopolitique et transcendantales que Vladimir Poutine est, lui, aujourd’hui, l’héritier, le porteur direct, l’« homme providentiel » appelé à une tâche prédestinée, qu’il lui appartiendra de mener jusqu’au bout.
Et c’est bien dans la lumière révolutionnaire de cette vision qu’il s’agit à présent de situer le véritable sens, tout le sens des récentes déclarations de Vladimir Poutine concernant la mission prédestinée des Forces Armées russes dans le travail de redressement et de salut révolutionnaire de la Russie et partant de l’ensemble du grand continent eurasiatique en tant qu’Empire Eurasiatique de la Fin que lui, Vladimir Poutine, se sait tenu d’assumer, d’une manière inspirée, et sans plus tarder. Car les portes du destin se sont refermées sur lui, et il faudra qu’il fasse ce qu’il incombe désormais de faire. Sans la moindre hésitation.
L’ombre protectrice des Forces Armées
En effet, Vladimir Poutine, le « De Gaulle russe », déclarait récemment que le redressement de la société russe, « actuellement au bord de l’abîme », passe, pour lui, par une réorganisation générale, en profondeur, du pays dans son ensemble, axée sur la priorité d’urgence accordée aux Forces Armées et à leur modèle d’agencement et de fonctionnement structurel, qui doivent devenir l’ossature organisationnelle du renouveau révolutionnaire de la « Nouvelle Russie », le noyau agissant de la naissance même des « temps nouveaux », l’expression des « temps nouveaux » étant en passe d’apparaître comme une rengaine obsessionnelle des bouleversements en cours ou à venir, le nouveau mot de passe. Et cela à telle enseigne que la future reprise industrielle de la Russie devra se trouver soutenue, dans un premier temps, sur l’exploitation suivie, intensive, du fonds des « technologies spéciales d’avant-garde » dont disposeraient actuellement les Forces Armées.
Induire une conception hautaine et « romaine » de l’État
Ainsi l’ombre protectrice de celles-ci s’étend-elle à nouveau sur l’ensemble de la société russe : les « nouveaux temps » de Vladimir Poutine viennent de ramener l’obligation formelle de la préparation militaire à l’école, et celle-ci suivie de près par les nominations en masse de militaires aux postes-clefs, aux postes stratégiques du renouvellement, de la réorganisation de la situation politico-administrative, sociale, économique et industrielle de la Russie ainsi poussée vers l’ère des changements accélérés, vers son abrupte « normalisation ». Reconstituer l’État, refaire et imposer une continuité, une volonté, une conception hautaine, « romaine » de l’État, tel semblerait être le but principal et immédiat de Vladimir Poutine, qui, par ailleurs, entretient le culte du secret, du non-dévoilement de ses plans d’action (culte du secret révélateur d’une ancienne habitude impériale russe, reprise en continuité par le pouvoir soviétique).
D’autre part, on n’ignore pas l’influence directe et profonde exercée, sur les milieux proches du groupe de commandement politico-militaire personnel de Vladimir Poutine, par le « manuel de géopolitique » impériale grand-européenne, eurasiatique et « transcendantale », « polaire », d’Alexandre Douguine, conseiller politique du Président de l’Assemblée Nationale de la Russie, chargé plus particulièrement de la direction active de la « cellule géopolitique » de celle-ci, entité responsable de la définition des grandes lignes de force géopolitiques actuelles et à venir de cette « Russie naissante » dont Vladimir Poutine entend forger les nouvelles destinées révolutionnaires.
Aussi l’importance qu’Alexandre Douguine et ses conceptions géopolitiques impériales eurasiatiques sont en train de gagner actuellement auprès du groupe de commandement politico-militaire de Vladimir Poutine apparaît-elle comme extrêmement significative, lourde de promesses d’avenir, parce que la pensée de notre camarade Alexandre Douguine est celle, précisément, de l’ensemble de nos « groupes géopolitiques » actuellement en action, les positions de combat et les thèses opérationnelles d’Alexandre Douguine sont les mêmes que celles avancées par le « Pacte Impérial Eurasiatique » cité déjà dans lé courant du présent article. Là, une boucle est bouclée, qui va profondément marquer les futures destinées politico-spirituelles du continent eurasiatique, et plus particulièrement de la plus Grande Europe.
Les anciennes républiques musulmanes d’URSS : une chaîne d’instabilité sur laquelle il ne faut pas céder
Il est d’autre part certain que si Vladimir Poutine a choisi d’axer sa propre prise de pouvoir politique sur le problème d’un règlement intégral et définitif du conflit de Tchétchénie, il avait parfaitement compris que, céder en Tchétchénie, ce serait devoir céder, ultérieurement, sur toute la ligne face au permanent complot suscité par la conspiration mondialiste, à travers la Turquie et derrière les manigances de l’islamisme fondamentaliste, sur le flanc méridional du continent eurasiatique, tout le long de la chaîne d’instabilité des républiques islamistes de l’ancienne Union Soviétique. Dans mon for intérieur, j’ai décidé que ma mission, que ma mission historique consisterait à régler le problème du Caucase-Nord, affirmait Vladimir Poutine dans un entretien avec la revue Kommersant de Moscou.
Or, si, comme il n’arrête pas de le dire, pour Vladimir Poutine, la guerre de Tchétchénie, guerre de déstabilisation et d’infiltration aux objectifs essentiellement subversifs, représente la ligne d’opposition de l’Islam et de la Chrétienté, il ne pouvait pas non plus ne pas comprendre, aussi, que, dans une guerre de religions, il s’agit de la confrontation irréductible de deux religions qui ne saurait prendre fin que par l’abdication de l’une devant l’autre de ces religions, et par conséquent d’une guerre totale.
Mais ce n’est certes pas là seulement la raison pour laquelle Vladimir Poutine ne cesse d’accentuer la nécessité de l’intégration à part entière de l’orthodoxie dans le bloc actuel du patrimoine révolutionnaire de la « Nouvelle Russie ». C’est qu’en même temps qu’il n’y a pas d’Empire sans une religion d’Empire, que l’acte fondationnel de la création – ou du renouvellement – d’un Empire ne saurait être que d’une nature exclusivement religieuse. Et que la grande mission eschatologique finale de la « Nouvelle Russie » se doit d’être, en dernière analyse, une mission religieuse.
Dans l’entretien déjà cité avec la revue Kommersant, Vladimir Poutine déclarait, aussi, que, quelques années après la mort de sa mère, qui l’avait fait baptiser clandestinement dans la religion orthodoxe, celle-ci lui avait donné sa croix de baptême, pour que, lors d’un voyage qu’il lui avait fallu faire en Israël, il la fasse bénir « sur le tombeau du Christ ». Et, ajoute-t-il, « pour ne pas la perdre, je l’ai mise autour de mon cou. Et, depuis, je l’y ai gardée. »
De toutes les façons, la « Russie Nouvelle » doit absolument se souvenir, sans cesse, qu’elle doit le miracle inconcevable de sa brusque libération du communisme, « comme par enchantement », au fait que, en communion avec tous les Évêques du monde, le Pape Jean Paul II avait consacré la Russie au Cœur Immaculé de Marie, suivant le vœu et la promesse sous condition qu’avaient prononcés la Vierge Marie lors de son apparition à Fatima, au Portugal, en 1917, l’année même où la Russie sombrait dans le cauchemar halluciné, dans le cauchemar sanglant et sombre de soixante-dix années de terreur communiste.
Mais il y a plus. Suivant la prophétie de Saint Maximilien Kolbe, le martyr de la charité d’Auschwitz, pour que la « Nouvelle Russie » puisse être vraiment au rendez-vous de ses retrouvailles prévues avec ses plus grandes destinées à venir, il faudrait que, sur la plus haute tour du Kremlin, l’Étoile Rouge soit remplacée par une statue votive de la Vierge Marie, symbole annonciateur du Regnum Mariae. Ce n’est qu’un symbole, mais c’est sans doute de ce symbole que dépend entièrement l’avenir eschatologie de la Russie et partant de l’ensemble impérial du grand-continent eurasiatique Cela, je ne sais pas si Vladimir Poutine le sait. Mais il faudra le lui faire savoir.
Pour le moment, la somme maximale des efforts à déployer par les « groupes géopolitiques », et par les formations politiques européennes que ceux-ci pourraient influencer, doit concerner la mise en piste de l’axe Paris-Berlin-Moscou. En même temps, si la plus Grande Europe est, désormais, à cause de la Russie, à la fois catholique et orthodoxe, il faudra s’empresser d’arriver à une réintégration des deux religions, catholique et orthodoxe, revenir en arrière jusqu’aux temps où leur séparation n’avait pas été consommée. Ce qui à présent paraît impossible, une volonté transcendantale le fera, soutenue par certaines centrales occultes à l’œuvre, et par la sainteté.
Jean Parvulesco
Publié en exclusivité sur Mecanopolis avec l’aimable autorisation des Editions Alexipharmaque.
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